En cette fin d’année 2024, l’équipe de PADEM est retournée sur le terrain, au contact de ses partenaires locaux et des participants aux projets. Hugo (chargé de projets Afrique) et Gaëtan (consultant international) ont pu passer un mois et demi au Kenya (2 semaines) et à Madagascar (4 semaines) dans le but de renforcer les relations avec les associations déjà soutenues mais aussi d’identifier de potentielles pistes de développement des activités au niveau de la sécurité alimentaire dans la zone Sud Est de Madagascar, régulièrement touchée par de violents cyclones.

Le programme de ces visites a débuté dans la ville de Nairobi avec le Legacy Education Centre (LEC) et la Kibera Girls Soccer Academy (KGSA), partenaire de PADEM depuis 2009. Les projets menés en collaboration avec ces deux partenaires ont pour objectif d’améliorer les conditions d’habitat, d’éducation et d’accès à des activités génératrices de revenu pour les familles des bidonvilles de Mathare et Kibera. La plupart des participants sont le plus souvent des mères célibataires victimes de violences basées sur le genre (abus physiques, moraux et sexuels principalement) ainsi que leurs enfants.

LEC et KGSA ont déjà pu apporter un support aux familles les plus vulnérables durant des projets précédents, en construisant des logements pour sortir ces familles fragiles de la rue et pour proposer un chemin vers une éducation de qualité pour leurs enfants.

Les deux associations accompagnent également les cheffes et chefs de famille dans leurs projets professionnels et d’épargne. Elles mettent en place des groupes d’épargne et de crédit pour favoriser leur accès à l’emprunt. Les compétences des cheffes et chefs de famille en termes d’autonomie se voient renforcées à travers la gestion du fonctionnement de ces groupes par les membres eux-mêmes.

Enfin, le troisième axe du projet est de sensibiliser le grand public à la lutte contre les violences basées sur le genre. La plupart du temps, ces violences ont lieu contre les femmes et les filles. La société kenyane est très patriarcale à certains égards, il a donc paru nécessaire pour les deux partenaires de PADEM de lutter contre ces problématiques de violences au sein des foyers. Au sein de LEC, des membres de l’équipe ont eux-mêmes été victimes de violences depuis leur enfance, cela vient ancrer une légitimité supplémentaire à évoquer ce sujet avec les habitants de ces bidonvilles.

Les visites de l’équipe au Kenya ont continué en direction de Busia. Toujours avec le partenaire LEC qui mène également des activités dans cette zone rurale du pays, frontalière avec l’Ouganda.

Les objectifs du projet dans cette zone sont les mêmes que pour ceux menés à Nairobi. Il s’agit d’accroître l’accès à des habitations sûres, à des activités génératrices de revenus visant à permettre l’amélioration des conditions de vie des familles et l’éducation des enfants. L’axe de lutte contre les violences basées sur le genre est également poursuivi dans cette zone du pays, ou les addictions à l’alcool sont davantage présentes qu’à Nairobi, ainsi que la prévalence des cas de VIH/SIDA. Ceux-ci atteignent 90% dans ce comté (parmi l’un des plus touchés du pays).

De plus, les activités dans le village de Mabinju, à 2 heures de route de Busia, intègrent un objectif d’adaptation des habitations aux problématiques actuelles d’inondations liées au changement climatique et au trop plein de la rivière Nzoia et du Lac Victoria.

La deuxième partie des visites d’Hugo et Gaëtan s’est effectuée à Madagascar, sur trois lieux distincts durant les quatre semaines. Après une visite des associations partenaires à Antanarivo et aux alentours, l’équipe est allée dans le Sud Est vers Mananjary avant de revenir à Antsirabe et Antanarivo pour la fin du séjour.

Les visites sur place ont démarré par des séances de travail dans le centre Akany Avoko Ambohidratrimo. Ce centre accueille des enfants, issus de familles vulnérables ou orphelins, placés par la justice. L’objectif du centre est d’apporter un cadre de vie adapté au bon développement des enfants pendant toute la durée de leur placement. Il a également été question de discuter de la désinstitutionalisation progressive de l’accueil des enfants avec les acteurs locaux pour favoriser un placement des enfants en familles d’accueil plutôt qu’en centre dans un futur proche.

Toujours sur le thème de la favorisation de l’accueil et du développement des enfants, les moments passés avec notre partenaire HARDI Madagascar ont permis à Hugo et Gaëtan de mieux appréhender les problématiques des enfants des rues à Antanarivo. Le séances de travail chez HARDI ont également été l’occasion pour eux d’acquérir une meilleure connaissance des lacunes du système éducationnel et de la formation professionnelle malgache. HARDI met en place au sein de son établissement 3 piliers dans l’éducation et la formation : de l’accueil préscolaire, des formations éducatives passerelles pour les jeunes en décrochage scolaire qui ne sont pas encore en âge de travailler et enfin de la formation professionnelle à destination des jeunes adultes. Toutes ces activités ont pour but d’accompagner les jeunes vers des conditions de vie plus décentes en développant leurs compétences pour les faire sortir de la rue et leur donner accès à des activités économiques lucratives.

La visite de l’association Ikoriantsoa à Antsirabe a permis à l’équipe de s’assurer du bon démarrage du projet, notamment dans la sélection des familles participantes. Les visites à domicile au sein de ces familles a été pour tous un moment très bouleversant tant l’importante vulnérabilité des ménages est ressortie, dans ce quartier de la ville où se mélangent villas de luxe et familles frappées d’extrême pauvreté.

Des visites de terrain réussies à Madagascar ne peuvent pas se dérouler sans quelques visites et sessions de travail avec le Centre d’Appui au Développement Rural Intégré (CADRI). Il a été question de rencontrer les familles agricoles participant aux projets d’autonomisation financière et d’accompagnement des enfants vers la santé via la distribution de bouillie enrichie et des visites médicales hebdomadaires dans les villages. Les échanges ont été riches et ont permis de dégager de nombreuses pistes pour améliorer la rentabilité des différentes activités de l’association : ateliers de production de bio-charbon pour lutter contre la déforestation, ateliers de démonstration agricole pour inspirer les familles paysannes à adapter leur travail et leurs cultures au changement climatique, atelier de traiteur alimentaire et pâtisserie, centre médical mère-enfant, centrale d’achat-vente, etc…

Lors de ces 6 semaines de travail hors du bureau, il a également été question de visiter d’autres centres d’accueil qui ne sont pas soutenus par PADEM pour tenter de trouver des synergies potentielles dans les activités de chacun et échanger sur les bonnes pratiques.

Les visites dans le Sud Est du pays ont permis de découvrir des problématiques dont l’équipe de PADEM n’avait pas encore conscience : le tabou des jumeaux à Manajary ou Manakara en est un bon exemple. Selon les croyances, les familles qui mettent au monde des jumeaux sont maudites et doivent se débarrasser soit d’un enfant soit des deux dès la naissance en fonction de la zone géographique. La durée de la présence d’Hugo et Gaëtan sur le terrain relève encore une fois l’importance que les membres de l’équipe au siège puissent aller visiter les projet in situ. Partir plusieurs semaines permet de mieux se plonger dans la réalité du terrain, mener des discussions approfondies sur le temps long et se familiariser avec les personnes qui sont derrières des noms ou des chiffres dans les rapports de suivi des projets.

Le travail est encore long mais les visites régulières sur plusieurs années permettent de faire émerger des progrès certains et nous font aborder l’avenir avec un optimisme de rigueur dans un monde ou le contexte social et politique est de moins en moins favorable à la solidarité internationale.